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Inceste - Ultime tabou !L’affaire Duhamel a mis en lumière tout ce que vivent les victimes silencieuses des violences sexuelles, ici de l’inceste, l’ultime tabou. Il faut d’abord que nous soyons reconnaissants envers cette parole libérée, car il s’agit bien d’un enfermement psychique, un « secret » très bien orchestré, prémédité et entretenu par la domination perverse de l’agresseur et de tous ses complices, celles et ceux qui se taisent. Bien sûr que tout le monde savait, c’est souvent le cas, et il ne serait pas étonnant de découvrir que celles et ceux qui savaient sont très nombreux et pour certains, très connus, c’est déjà le cas.

« L'inceste qualifie les « relations sexuelles prohibées entre parents très proches », entre parent et enfant, entre enfants d'une fratrie (y compris demi-frère et demi-sœur), entre grand-parent et petit enfant, ou encore entre oncle ou tante et neveu ou nièce, voire selon certains entendements entre cousins. Autrement défini, l'inceste désigne une relation sexuelle lorsqu’elle a lieu dans le cadre d'une parenté qui interdit le mariage, ce qui peut alors impliquer les filiations par alliance ou l'adoption. »

Un enfant, quel que soit son âge, n’est jamais responsable des transgressions d’un adulte, il faut le redire. Même s’il est « consentant », par innocence, jeux, menaces ou manipulation, la faute revient à l’adulte et à lui seul, à l’agresseur dans tous les cas.

Le traumatisme induit est majeur pour plusieurs raisons : parce que l’acte a lieu au sein de la famille, qu’il est une trahison du lien d’affect par une personne proche, un parent, en qui l’enfant a confiance et qu’il aime, rappelons-le, parce qu’il y a humiliation par agression sexuelle et de part le silence imposé, une bombe à retardement.

Lorsque l’enfant découvre la nature et l’interdit de l’acte, c’est d’abord la honte qui l’envahit et la honte est un poison qui se distille lentement dans la construction de l’enfant et qui va l’empêcher de parler. S’ajoute à cela la peur, peur de ne pas être cru : cela semble tellement fou que mon père, mon beau père, mon oncle, mon grand-père, et parfois une femme, puisse agir de la sorte, qui va me croire ? Il est tellement aimé, reconnu, important dans son milieu, qui va m’entendre dans ce monde d’adultes ? Même sa propre mère ne l’entendra pas, alors qui peut le faire ? Cette détresse inqualifiable incite au repli sur soi, à l’isolement et au maintien du silence, car si l’enfant ne peut pas être entendu, comment va-t-il se réparer ? En effet, ce crime spécifique désorganise et perturbe considérablement et durablement la personnalité. Alors, l’enfant va taire ce qui « ne sait pas se faire entendre » car il le sent bien, inconsciemment ou pas, c’est difficile, voire impossible, de parler de ce qui s’appelle l’inceste.

On préfère détruire l’enfant plutôt que de dénoncer l’agresseur !

La responsabilité est multiple et sans appel. L’époque, tant revendiquée, n’est pas une excuse pour se dédouaner d’un crime et d’un interdit connu de longue date. Le terme d’inceste a été prononcé pour la première fois par Freud en 1897 et, depuis, maintes livres sont parus, maintes conférences tenues, maintes affaires mises au grand jour, maintes associations en parlent clairement, on ne peut pas dire que l’on ne sait pas, on sait !

Mais peu ont le courage de sauver les enfants, il faut maintenir la famille coute que coute, se taire, ne pas dénoncer l’ignominie, ne pas briser une carrière, ... C’est la lâcheté même d’une famille tout entière, des proches, des amis, qui préfèrent regarder ailleurs plutôt que de regarder la réalité en face, la réalité de la vie d’un enfant !

Mais qu’est-ce qu’un enfant ? Cette petite chose qui oubliera ... Non, jamais on oublie ce genre d’acte ignoble ! Il va circuler dans chaque veine de ce sang, dans chaque fibre de ce corps meurtri, dans chaque vaisseau de ce cerveau à jamais endommagé et devenir le point central d’un mal être permanent, d’une impossible relation sexuelle « normale » ou même juste de la notion d’amour, cet amour bafoué et trahi il y a si longtemps que veut-il dire ? D’un manque de confiance permanent qui va porter préjudice à la vie professionnelle, d’une culpabilité déstabilisante qui modifie les rapports aux autres, etc. Bien sûr, c’est possible de vivre avec, mais ce « avec » suppose une vie rafistolée de toute part, oui, c’est faire avec, donc comme on peut !

L’inceste, qui n’est pas affaire de catégorie socio-professionnelle, suppose au moins attouchements et au pire viol. L’inscrire clairement dans la loi permettrait également d’en finir avec le débat sur le consentement. Là aussi, il faudra combien de temps pour fixer cet âge ? La majorité sexuelle en France se situe à 15 ans, il parait déjà inconcevable que l’âge du consentement se place en dessous de celui-ci. On connait quoi à 13 ans de la vie sexuelle, dece qui est interdit ? Qui explique cela aux enfants pour qu’ils aient une quelconque connaissance du sujet ? Quelle famille le fait, quel programme scolaire ? Comment peut-il savoir ?

L’inceste peut commencer dès la naissance d’un enfant et peut perdurer au-delà de sa majorité dans le silence le plus total, car l’agresseur sait maintenir ce silence. Il doit être clairement défini dans le seul but de protéger l’enfant et de toute façon, je le redis, un enfant ne peut consentir à un acte sexuel avec un adulte, c’est assez simple !

Le temps du silence, qui n’est en rien la faute de la victime, mais du sordide schéma construit par l’agresseur, ne doit pas avoir de limite. La prescription constitue un frein à la reconstruction, elle est un obstacle de plus en défaveur de la vérité et de la réparation. Elle est aussi en faveur du bourreau qui coule des jours tranquilles, tandis que la victime est rongée de l’intérieur.

Il est temps, dans ce pays qui est la France, d’en finir avec la protection des agresseurs de tous milieux, la minimisation des faits et de la parole, l’incompréhension du silence des victimes, la faute jetée sur elle et toutes ces questions récurrentes : « Pourquoi tu n’as pas parlé avant ? », qui contribuent à la non-reconnaissance du traumatisme vécu et, de fait, disqualifie la violence sexuelle.

Il est temps de considérer l’enfant, comme une personne à part entière dans sa fragilité et sa vulnérabilité, qui doit être protégé et défendu.
Il est temps que la justice prenne acte et que la société cesse de se conforter dans ce (faux) déni.
Il est temps de se dire que le seul responsable, c’est l’agresseur.

Nathalie Cougny
Présidente de l’association « Les maltraitances, moi j’en parle ! »


Le 15/01/2021

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